Lutte contre le terrorisme : Plaidoyer pour un cadre de concertation entre autorités et médias
Le terrorisme considéré présentement comme la plus grande menace sur la paix et la sécurité en Afrique subsaharienne est devenu une préoccupation pour les autorités, les populations et les autres acteurs de la région. C’est dans ce même souci que le Bureau paix et sécurité de la Fondation Friedrich Ebert a initié une conférence pour débattre sur le thème: « Autorités, médias et terrorisme : la difficile équation ». Lors de cette rencontre, les panélistes ont plaidé pour qu’il y ait un cadre de concertation et de collaboration entre les autorités représentées par les forces de défense et de sécurité et les médias pour briser la barrière qui existe entre ces différents corps et ainsi lutter efficacement contre les organisations terroristes. Faisant l’Etat des lieux des relations entre autorités et médias en matière de terrorisme, le Pr Rachid Benlabbah, enseignant-chercheur à l’Institut des Etudes africaines de l’Université Mohamed V du Maroc, évoque l’existence d’une barrière entre les deux parties. A l’en croire, « les études faites révèlent qu’il y a une barrière entre les différents corps. Les autorités sont réticentes, elles établissent souvent avec prudence leurs rapports avec les médias ». Aussi souligne-t-il qu’à l’échelle de l’Union africaine et panafricain, il est donné peu d’importance à tout ce qui relèverait des politiques de communication sur le terrorisme.
Cadre de coopération
D’après Pr Benlabbah, ce déficit de cadre de concertation et de coopération est à résorber d’autant plus que dans la région sahélienne et nord-africaine, on voit de plus en plus que les organisations jihadistes sont entrain de vouloir développer des canaux de communication, des médias pour toucher un large public pour le recrutement, la sensibilisation car ils veulent défendre leur version des choses. « Il faudra donc être prudent parce qu’un manque de concertation et de collaboration entre les différents acteurs légaux du champ terroriste donnerait plus de possibilité pour toucher les organisations terroristes », avance-t-il.
Se prononçant sur le cas du Sénégal, le commissaire divisionnaire de la Police, Pierre Mendy, par ailleurs directeur de la surveillance du territoire, indique que la question du terrorisme est extrêmement sensible. Mais cette sensibilité n’est pas perçue de la même manière par la presse, les autorités et les forces de défense. Pourtant, fait savoir le commissaire Mendy, il s’agit d’une matière extrêmement grave qu’il faut traiter avec beaucoup de prudence pour éviter d’en rajouter à la peur et à l’horreur recherchées par les terroristes. Il s’agit aussi d’une affaire qu’il faut traiter avec prudence pour ne pas saper les efforts de développement économique. Il reconnaît toutefois qu’il faudrait un cadre de concertation et de coopération entre les forces de défense et de sécurité et les médias. « Les risques de conflits ou de relations assez heurtées entre des forces de sécurité et la presse sont réels à cause de l’absence de cadre concertation et de coopération. Mais même à l’absence de ce cadre dans le domaine du terrorisme, il y a pas encore de conflit entre cette presse et les autorités, il y a comme une prise de conscience de part et d’autre », informe le directeur de la surveillance du territoire. Le commissaire Pierre Mendy précise que dans le souci d’une plus grande ouverture dans le traitement de la matière liée au terrorisme, la Police sénégalaise, à travers son Bureau des relations publiques, prévoit la mise en place dans le Cadre d’intervention et de Coordination interministériel des opérations de lutte anti-terroriste, une cellule qui va gérer l’information relative à un incident avec la presse.
Le colonel Alioune Ndiaye, ancien chef du Bureau des relations publiques de la Police, est également d’avis pour la création de ce cadre de concertation avec les médias. Mais il remarque que le comportement de certains medias et la prolifération des radios « buzz » promptes à balancer des informations sans sources ne favorisent pas très bien la collaboration qui doit exister entre les autorités et les journalistes. D’où l’intérêt de revoir ce comportement avant d’établir ce cadre de concertation et de collaboration.
Auteur: Maguette Guèye DIEDHIOU
Friedrich-Ebert-Stiftung
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