Thursday, 10.10.2024 - PSCC Talk - Zoom

Opportunités et perspectives d’une participation des femmes pour promouvoir une culture de la paix en Afrique de l’Ouest et au Sahel

Dans le cadre de ses conférences virtuelles dénommées « PSCC Talk » le bureau Paix et Sécurité Centre de Compétence Afrique Subsaharienne de la Fondation Friedrich Ebert (FES PSCC) Dakar a organisé le Jeudi 10 octobre 2024 une conférence sur le thème « Opportunités et perspectives d’une participation des femmes pour promouvoir une culture de la paix en Afrique de l’Ouest et au Sahel ».

Face aux multiples défis que connait l’Afrique de l’Ouest et plus particulièrement la région du Sahel, celui concernant la sécurité est sans aucun doute le plus pressent. Aussi, semble-t-il nécessaire d’engager les différentes catégories de la population afin de jouer un rôle dans la promotion et la consolidation de la paix. Dans ce sens, les femmes et les jeunes, notamment, représentent une catégorie importante et leur participation et inclusion n’est plus une simple option, mais une priorité stratégique que les pays de la région doivent désormais intégrer dans leurs programmes et plus particulièrement dans les agendas de promotion de la paix et de la sécurité.

Dans une déclaration publiée par sa Présidence, le Mercredi 3 Février 2021, le Conseil de sécurité de l’ONU insistait sur l’importance du rôle des femmes en Afrique de l’Ouest et au Sahel dans la prévention et le règlement des conflits ; ses membres soulignant que les femmes « doivent participer sur un pied d’égalité à tous les efforts visant à maintenir et à promouvoir la paix et la sécurité et y être pleinement et véritablement associées ». Les femmes sont au cœur des efforts visant à instaurer une paix durable par l'inclusion, la justice et la sécurité.

Au niveau mondial et régional, divers cadres et mécanismes sont mis en place pour soutenir et renforcer la participation et le rôle des femmes dans les processus de paix. Cette notion est explicite dans l'agenda 2000 établi par la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité. Cet agenda exhortait tous les acteurs à accroître la participation des femmes et à intégrer les perspectives de genre dans les efforts de paix et de sécurité de l'ONU et appelait à l'autonomisation et à l'inclusion des femmes dans la prévention et la résolution des conflits et la consolidation de la paix. En Afrique, pour promouvoir la protection des droits des femmes, garantir l'intégration de la dimension genre et la participation égale des femmes aux processus de paix, plusieurs politiques, cadres et mécanismes existent au sein de l'Union africaine : de sa politique cadre sur la réforme du secteur de la sécurité au Protocole à la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (2003), en passant par la Déclaration solennelle sur l'égalité des sexes en Afrique (2004), la Déclaration solennelle sur une politique africaine commune en matière de défense et de sécurité (2004), la politique de reconstruction et de développement post-conflit (2006), la politique de l'UA en matière de genre (2009).

Malheureusement, l’appropriation et la mise en œuvre concrète de ces politiques au niveau des Etats membres posent problèmes et varient d’un Etat à un autre. Malgré de timides efforts notés çà et là les femmes restent souvent marginalisées et largement exclues des instances décisionnelles dans les processus de paix.

En cette année 2024 qui marque le 25e anniversaire de l’adoption par l’Assemblée générale des Nations Unies de la Déclaration et du Programme d’action sur une culture de la paix qui reconnaît que la paix « n'est pas simplement l'absence de conflits, mais est un processus positif, dynamique, participatif qui favorise le dialogue et le règlement des conflits dans un esprit de compréhension mutuelle et de coopération », il importe d’analyser les contours de ce débat qui est de plus en plus d’actualité pour une meilleure implication et intégration des femmes à tous les niveaux dans les processus de paix pour une région davantage stable et sûre.

La conférence animée par Dr. Saran Daraba KABA, Présidente du Réseau des Femmes de l’Union du Fleuve Mano River pour la Paix (Guinée-Conakry), Mme Aminata Wallet AZAROCK, Présidente Association pour le Développement et la Paix au Mali (Mali), Mme Aminata Kansaye CISSE, point focal Genre à la Mission de l'Union africaine pour le Mali et le Sahel (Mali), Mme Diago Diagne NDIAYE, Présidente Régionale Réseau Paix et Sécurité des Femmes de l’espace CEDEAO (Sénégal) a été l’occasion d’analyser les contours du débat sur une meilleure implication et intégration des femmes à tous les niveaux dans les processus de paix pour une région du Sahel davantage stable et sûre.

Les discussions modérées par Mme Diyé BA, Coordonnatrice de la Plateforme régionale des femmes du G-5 Sahel (Mauritanie), ont porté sur les points ci-après :

  1. Quelle est la situation de la participation des femmes aux processus de paix en Afrique de l’Ouest et au Sahel ?
  2. Quelle peut être la plus-value d’une meilleure participation des femmes dans la prévention des conflits et la culture de la paix dans la région ?
  3. Comment renforcer le rôle des femmes et leur inclusion dans les processus de paix tant au niveau régional que national ?
  4. Quelles sont les perspectives envisageables pour mener des plans de plaidoyer conjoints en faveur de la paix au niveau national et régional ?

Les échanges ont dressé de manière unanime un certain nombre de constats :

  • La résolution 1325 reconnait le rôle important que jouent les femmes dans les sphères économique, politique, sociale. En ce sens cette résolution est un mécanisme formidable qui même si elle connait des différences d’application selon les pays, mérite une promotion. Malheureusement elle rencontre des défis dans sa mise en œuvre.
  • Il y a nécessité d’une autonomisation économique des femmes pour renforcer leur participation aux processus de paix.
  • La valeur ajoutée de la participation des femmes est perceptible parce qu’elles évoquent les vrais sujets de sociétés et répondent aux besoins des populations à travers des approches innovantes et des solutions pragmatiques. Elles ont une meilleure compréhension des dynamiques locales et communautaires ce qui fait d’elles des médiatrices et pacificatrices communautaires crédibles à tel enseigne que dans certains pays on les appelle « faiseuses de paix ». En témoigne le rôle de garant moral de l’accord de paix inter-libériens joué par le réseau des femmes.
  • Créer des synergies pour permettre aux femmes de jouer pleinement leur rôle à tous les niveaux.
  • Faiblesse de la participation des femmes malgré la richesse des textes qui promeuvent leur implication et participation et qui remontent à la charte du Mandé de 1215.
  • Appuyer les organisations locales de femmes à travers des formations pour renforcer leurs capacités et leur savoir-faire, créer des réseaux de femmes au plan régional et international et mettre en place des programmes de mentorat et de stage pour développer leurs compétences en négociation, gestion institutionnelle afin de susciter des aspirations féminines dans ce domaine.
  • Dans le contexte régional actuel il faut tenir compte des nouveaux défis : changement climatiques, migration irrégulière comme régulière, entre autres.
  • Faible représentation des femmes aux négociations de paix. Selon ONU Femmes, les femmes représentent moins de 10% des négociateurs de paix dans le monde et seulement 3% des signataires des accords de paix. Néanmoins on constate que de nombreuses initiatives locales sont en cours. Les femmes travaillent sur le terrain pour la paix communautaire malgré de nombreux obstacles (discrimination, renforcement de capacités, manque de ressources pour influencer efficacement les processus de paix). Il s’y ajoute les normes patriarcales qui constituent un défi supplémentaire auquel les femmes doivent faire face dans leur engagement en faveur de la paix.
  • Plusieurs initiatives sont entreprises entre les partenaires internationaux et les femmes actrices locales mais de telles initiatives ne sont pas harmonisées et synchronisées à la limite elles sont concurrentes en fonction des agendas différents des partenaires internationaux. Ce qui les rends par conséquent contre productives.

En termes de perspectives il a été recommandé de mutualiser toutes les initiatives des organisations de femmes sur actives dans le domaine de la paix et de la sécurité tant au niveau national et sous-régional que continental. Cela implique de capitaliser les acquis et toutes les initiatives en incluant les personnes qui vivent avec un handicap. Pour ce faire il convient de collaborer avec les structures médiatiques pour vulgariser, sensibiliser, dénoncer, toucher les femmes des localités les plus éloignées et dans les zones périphériques. Ceci a l’avantage de se rapprocher de la base et d’éviter le piège de l’élitisme.

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Paix et Sécurité Centre de Compétence Afrique Subsaharienne

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